Reconfiguration en douceur au sein de la majorité présidentielle. En toile de fond, il y a l’enjeu de la succession ouverte de Joseph Kabila cristallisée autour de la très sensible question de la désignation de son dauphin. Personne n’ose en parler publiquement dans le camp présidentiel mais dans le plus grand secret, chaque prétendant pousser ses pions, tisse sa toile quoique le mystère reste entier quant à savoir si Kabila allait passer la main enfin.
Des prétendants, il y en a deux qui sont les plus cités, Augustin Matata Ponyo et Aubin Minaku Ndjalandjoku. Depuis un certain temps, Néhémie Mwilanya aussi qui se serait découvert soudainement une ambition présidentielle. Comme tout décor, celui-ci se prolonge sur des coulisses avec lesquelles il faudra compter pour une compréhension générale de la situation.
Ne sont- elles peut-être pas déterminantes dans la combinaison des rôles ces coulisses si chères à Evariste Boshab qui l’ont vu rebondir là où personne ne l’attendait le moins. Presque tous étaient lancés à spéculer sur Matata ou Minaku lorsque contre toute attente Kabila désigne discrétionnairement Boshab pour patronner l’investiture de Ramazani Shadari comme secrétaire permanant du PPRD reformé.
Un geste qui a brisé le rituel traditionnel du sortant en droit en droit d’introniser l’entrant. Du coup, il s’est matérialisé dans l’espace public ce petit soupçon de complicité longtemps chuchoté au Palais de la nation entre Joseph Kabila et l’homme qui lui a apporté la victoire électorale en 2011, à lui et au PPRD. C’est dire que Boshab était encore consulté.
Mieux, qu’il a un mot à dire dans la prise de décision sur des questions clés, même si l’ancien secrétaire général du PPRD reste très discret, partagé entre ses enseignements à l’université et de longues réflexions stratégiques dans ses bureaux du quartier Utexafrica de Kinshasa. C’est ça qui fait sa force ou sa faiblesse, sa grande capacité d’anticipation, sa très grande propension à dire les choses telles qu’elles sont, à dire la vérité au chef.
Quand il écrit par exemple «Révision constitutionnelle ou inanition de la nation», il énerve certes le ruisseau constitutionnel qui coule tranquillement depuis 2006, mais ne dit pas moins à la majorité qu’il faut savoir s’assumer et assumer la volonté du chef, avouée et inavouée. Entre les deux dauphins pressentis, Boshab a pris un rôle beaucoup plus avantageux qui consiste à demeurer un pôle d’influence dans l’ombre susceptible de jouer au faiseur des monarques le moment venu. Ceux qui le comprendront plutôt ne seront pas surpris au moment où les choses basculeront d’un côté comme de l’autre.
Dans cette ombre si propice à Boshab, celui-ci se fait contrebalancer par le limbe politico-militaire katangais de la kabilie à la recherche de son propre dauphin à piocher dans le «terroir». Parmi ses animateurs les plus influents et les plus actifs, il y a le Général John Numbi. Ici le schéma passe par un ralliement du ministre gizengiste mais au fond pro-Kabila – Martin Kabwelulu, quitte à en faire le candidat mulubakat a l’intercession des intérêts du PALU et des gardiens du temple de Manono.
Constant Mohelo