Fruit de la coopération sino-zaïroise , le stade des Martyrs de Pentecôte , construit en 1988 avant d’être rénové en 2008 – doté d’une capacité de 80 mille places assises – ne se remplit pour la plupart de cas que lors des grandes rencontres de football ou encore des grands concerts musicaux dont l’entrée est souvent libre.
C’est le plus grand cadre d’organisation des événements que connait le pays. D’aucuns ne pouvaient imaginer un seul instant que ce lieu soit choisi pour organiser les funérailles d’un homme, quel que soit son rang dans la société.
Généralement, c’est le palais du peuple, un endroit prestigieux , qui a toujours servi de cadre au gouvernement pour organiser des funérailles des personnalités politiques ou des grandes stars du pays.
Le choix politique du stade des Martyrs – un lieu chargé de beaucoup d’histoires – pour organiser les obsèques de sphinx de Limete n’a pas été au hasard.
Croyant en la grandeur de la lutte de celui qui est considéré comme le « père de la démocratie » par une frange importante de ses partisans, personne n’aurait pu imaginer que le stade des Martyrs puisse demeurer en grande partie vide durant les deux jours consacrés aux hommages de l’ancien président de l’UDPS.
S’agirait -il d’un désaveu des Kinois face au nouveau régime ? La militarisation à outrance des lieux, ponctuée par des fouilles systématiques de la population, a-t-elle refroidi son engouement pour venir lui rendre les derniers hommages ?
Autant de questions qui bouleversent la mémoire de plus d’un observateur averti.
Cependant, certains analystes mettent sur le compte de l’amateurisme de l’organisation de ces obsèques , le raté qu’on déplore ce jour.
En effet, le climat de terreur qui a été observé dans les encablures et à l’entrée du stade, a été l’une des facteurs essentiels qui a découragé une grande partie de la population Kinoise à se mobiliser massivement pour honorer la mémoire de l’illustre disparu.
Et comme en pareil cas, il n’était pas facile de distinguer les mesures de sécurité normales des tracasseries auxquelles la population était généralement soumise.
Par ailleurs, l’excès de zèle des éléments des services commis à la sécurisation du stade lors de l’exposition de la dépouille mortelle du regretté opposant , a contribué à occulter le sens même des obsèques « populaires », auxquelles tout le peuple s’attendait.
Le communiqué diffusé précipitamment sur les antennes de la RTNC par Augustin Kabuya – le Secrétaire Général de l’UDPS – invitant les Kinoises et kinois à la rescousse pour venir rendre leurs hommages à l’ancien premier ministre de Mobutu, soulignant qu’il n’y avait plus des restrictions pour accéder au stade , témoigne du malaise qui s’était emparé de ce parti , devant le fiasco auquel on allait aboutir.
Mais malgré ce communiqué, certaines personnes ont été interdites d’accéder au stade à cause, notamment de leurs tenues vestimentaires, ce qui ne cadrait nullement avec le caractère populaire de ces hommages, chaque congolais étant ténu de venir rendre hommage à son leader , sans aucune distinction de rang social et signes apparents de richesse.
Il y a lieu de souligner que la plupart de ces kinois qui n’avaient pas pu accéder au stade le premier jour, à cause de leur apparence, ont dû rapporter à leurs proches restés à la maison ou dans le quartier , les conséquences qui se sont faites remarquer le lendemain ,le 31 mai, où les travées du stade étaient grandement dégarnies.
Généralement, lorsqu’on vient rendre ses derniers hommages à une importante personnalité de la trempe d’Etienne Tshisekedi, l’on doit veiller à ce que le couvercle du cercueil soit entreouvert de manière à permettre à ceux qui ne l’avaient pas vu, de voir son visage pour la dernière fois. Mais en en ce qui concerne le leader maximo, les pauvres Kinoises et Kinois qui s’étaient déplacés n’ont pas eu la possibilité de voir le visage de celui qui s’était engagé dans la lutte pour l’avènement d’un état de droit en RDC.
Et à l’instar d’autres grands hommes politiques , comme Ghandi ou de Nelson Mandela, où leurs dépouilles mortelles ont été exposées deux ou trois jours afin de permettre à tout le monde de venir se reccuillir paisiblement, celle de sphinx de Limete a été interdite à une certaine catégorie de personnes, à cause de leurs tendances politiques.
Tel est le cas des leaders de Lamuka qui, en dépit de leur volonté manifeste de venir s’associer à la douleur qui frappait le peuple congolais et de venir rendre leurs derniers hommages à une personnalité à laquelle ils ont partagé la même lutte, ont été tout simplement exclus du programme par le protocole.
Ils n’ont reçu aucune invitation de la présidence de la République, encore moins des réponses aux multiples démarches qu’ils avaient entreprises auprès des organisateurs pour obtenir un espace destiné à recevoir leurs gerbes de fleurs.
Il convient de noter que contrairement aux obsèques de musiciens Mabele Elisi ou Marie Misamu, organisées également au même endroit, celles du Grand cordon de l’ordre des héros nationaux Lumumba – Kabila n’ont pas reflété la popularité qu’avait l’homme.
Une évaluation sérieuse et sans complaisance de l’UDPS devra être faite afin de comprendre les causes profondes de cette apparente démobilisation observée lors des obsèques du père de l’actuel président de la République.
Décédé le 1 février 2017 à Bruxelles, Étienne Tshisekedi a été inhumé le samedi 1 juin 2019, dans un mausolée érigé en sa mémoire, dans une concession familiale située dans la commune de la N’sele.
Isaac Ngwenza