Le débat scientifico-politique autour de ce qui convient d’être appelée « géuguerre politique » provoquée par le président de la République lors de sa sortie médiatique devant la communauté congolaise de la Grande-Bretagne, à Londres relative à la possibilité de dissolution de l’Assemblée nationale en cas de crise, continue d’alimenter les débats et réflexions dans l’opinion publique congolaise.
Pour Me Jean K. Minga – juriste congolais basé en Belgique et consultant à politiquerdc.net – se basant , notamment sur les ordonnances présidentielles nommant les mandataires à la Gécamines et à la SNCC – toujours en souffrance – l’impuissance du président est manifeste en dépit des propos lénifiants développés par ses partisans. Pour lui, dissoudre une Assemblée nationale dominée par les membres du FCC – sans respecter les prescrits de l’article 148 de la constitution- pourrait pousser ces derniers à saisir la cour constitutionnelle visiblement à leur solde , ainsi que le prévoit l’article 161 de la constitution. Par ailleurs, Me Jean K. Minga qui craind fort qu’au finish ce débat risque de glisser du terrain judiciaire vers l’affrontement politique, sinon militaire, pense que le contexte actuel n’est pas favorable à une telle démarche de la part du président de la République dont la légitimilité politique et populaire reste encore à solidifier, peut -t-on comprendre de l’analyse, dont votre média en ligne vous invite à découvrir ci-dessous.
Mon point de vue sur l’éventualité de la dissolution de l’Assemblée nationale.
Les juristes sont loin d’être unanimes sur la question qui divise l’opinion à propos de la disposition ( article 148 de la constitution) – au cœur des échanges sur les réseaux sociaux – depuis l’intervention du président Tshilombo devant ses partisans en Grande-Bretagne.
En effet, en droit public, les compétences sont d’attribution et, sur le pied de l’article 148 de notre constitution, le droit de dissoudre l’Assemblée nationale est reconnue au président de la république. Seule autorité détentrice de la compétence de déclencher la procédure de dissolution de l’Assemblée nationale, sous certaines conditions limitativement énumérées, j’ai de la peine à croire qu’il peut étendre la liste de ces hypothèses.
N’empêche, notons qu’il y a de conditions de forme et celles de fond.
– sur la forme, la première condition est que la dissolution est insusceptible d’intervenir avec succès avant un an de l’installation effective du parlement. Cette exigence est presque remplie à ce jour.
La deuxième condition de forme est la consultation préalable du premier ministre et de deux présidents du bicamérisme parlementaire. Cet avis – de mon point vue – n’est pas à confondre à une quelconque autorisation sans laquelle le président de la république ne peut dissoudre l’Assemblée. Il ne peut entraver la décision du chef de l’État.
– sur le fond:
La dissolution n’est envisageable qu’en cas de crise persistante entre le gouvernement et l’Assemblée nationale, ainsi que le précise l’article 148 de la constitution.
Dans le cas présent, la crise – ou ce qui la ressemble – est interne au pouvoir exécutif, autrement dit entre le président de la République et certains membres du gouvernement. Ce cas de figure ne rencontre pas la condition de fond visée par l’article 148.
Dans l’hypothèse où le Président devait prendre la décision de prononcer la dissolution de l’Assemblée nationale, il s’élèverait indiscutablement au moins une controverse qui risque de plonger le pays dans l’incertitude.
Un cas de fraîche date mérite d’être épinglé pour nous en convaincre. C’est celui des deux ordonnances présidentielles nommant les membres du conseil d’administration à la Gécamines et à la SNCC qui ont été bloquées par le ministre FCC du portefeuille. L’impuissance du président est manifeste en dépit des propos lénifiants développés par ses partisans. Si ces deux actes apparemment anodins posent problèmes, comment l’ordonnance de dissolution pourrait produire ses effets sans susciter la controverse ?
Étant donné que l’ordonnance présidentielle de dissolution de l’Assemblée nationale sera un acte administratif, les proches du chef de l’État pourront saisir – en cas de contestation – le conseil d’État, sur le pied de l’article 154, en vue d’obtenir de cette juridiction sa lecture sur la conformité de la décision présidentielle. Le conseil d’État étant actuellement présidé par le professeur Vundwawe, connu pour son indépendance d’esprit, la suite est imprévisible.
Quant aux partisans du FCC dont la cour constitutionnelle leur est favorablement phagocytée, nul doute qu’ils se tourneront vers cette dernière. Elle pourrait être saisie en interprétation de la disposition constitutionnelle 148, ainsi que le prévoit l’article 161 de notre loi fondamentale.
Ils pourront également faire usage, comme l’a laissé clairement entendre Jeanne Mambunda – la présidente de la chambre basse du parlement – de l’article 165 comme moyen et accuser le président de la république devant la cour constitutionnelle.
Ainsi, sans prétention quelconque, je suis porté à croire que la décision de la dissolution de l’Assemblée nationale est de nature à susciter plus de controverses qu’à apporter de solutions. Et même en cas de succès – ce qui est peu probable – le président Tshilombo risque, en cas d’élections législatives anticipées, de perdre davantage les plumes (sieges) qu’il n’en dispose maintenant. Le FCC aussi .
Par ailleurs, je crains fort qu’au finish, ce débat risque de glisser du terrain judiciaire vers l’affrontement politique, sinon militaire. Le rapport de forces pourra alors départager les protagonistes ou plonger le pays dans la zone d’incertitude que nombre des congolais ne souhaitent plus.
Ce n’est qu’un avis!
Me Jean K. Minga, juriste et consultant à politiquerdc.net