La recette tyrannique de l’ancien régime caractérisée par des intimidations, des enlèvements et des menaces physiques refait surface alors que l’on rêvait d’un état de droit en RDC.
Plusieurs cas d’abus de pouvoir et de violations de droits de l’homme sont régulièrement enregistrés même en plein jour pendant que certains entonnent frénétiquement le refrain « d’État de droit ».
Les derniers cas en date sont , notamment ceux d’un certain Ibrahim Kabila qui se réclame fils du défunt président Laurent Désiré Kabila et celui de Henri Magie – le vice-président de la ligue des jeunes du PPRD- enlevé en plein air ce samedi sur le boulevard du 30 juin, à Kinshasa.
Alors que l’état de droit suppose une société respectueuse des lois et des procédures, les enlèvements et arrestations musclées deviennent la norme. On pensait que la pratique décriée pendant les 18 ans de Joseph Kabila était dévolue, mais on réalise qu’il n’en est rien.
Les deux cas de violation des droits humains cités en exemple ci-dessus interviennent au lendemain de l’arrestation de l’évêque Pascal Mukuna – un pasteur proche du président de la République – actuellement incarcéré à la prison centrale de Makala pour un présumé viol et harcèlement sexuel à l’endroit d’une brebis de son église.
En effet, ce vendredi 15 mai 2020, l’opinion kinoise aura assisté à une scène surréaliste de l’interpellation de Ibrahim Kabila. Ce dernier aurait été enlevé sur l’avenue Kabambare – juste après le tournage d’une émission télévisée – sur Congo Web Télévision. Un invité de marque dont le présentateur affirme avoir été surpris d’apprendre son passage – dans son émission – sur les réseaux sociaux, avant qu’il ne soit formellement contacté par une personne intermédiaire.
Ce qui paraît curieux, c’est de constater – sur le lieu de « l’enlèvement », – une mobilisation spontanée des Wewa ( des chauffeurs des motos identifiés de l’espace grand Kasaï, ndlr). Et très vite, le nommé Ibrahim a été localisé à l’inspection provinciale de la police. Cette dernière a permis même au présentateur de poser avec la victime d’enlèvement. Une première !
Transférer ensuite au parquet, il a été par la suite libéré, tard dans la soirée. De là, beaucoup ont salué l’implication personnelle du chef de l’État.
Mais comment le président pourrait-il s’impliquer pour obtenir la libération d’une personne dont on reprocherait de nombreux antécédents judiciaires et surtout d’avoir tenu de propos maladroits à l’endroit du président honoraire Joseph Kabila ? Et dans ce vaste pays, quel sort est réservé à tous les justiciables dépourvus de réseaux pour atteindre le chef de l’État ?
Comment les wewa se sont – ils si vite retrouvés en masse sur le lieu de « l’enlèvement »?
Qui était le plaignant et quels sont les griefs retenus contre Ibrahim ?
Faudrait -il vraiment parler d’un « enlèvement » où d’une stratégie montée par les services de sécurité dans le but d’amadouer l’opinion sur la capacité du pouvoir à garantir l’état de droit à tous ?
Autant de questions qui taraudent les esprits.
Une chose est vraie, Ibrahim Kabila semble plus proche du pouvoir. L’un de ses frères revenu dernièrement de l’exil travaillerait d’ailleurs à la présidence de la République. Et celui qui a été le premier à communiquer la nouvelle de la relaxation de Ibrahim au présentateur de l’émission Bosolo na politik officiel – qui intervenait en direct dans une émission de notre confrère Marius – qui est basé aux états unis d’Amérique. Quelle coïncidence!
Il faut dire que l’arrestation de l’évêque Mukuna – le président de l’éveil patriotique – une structure montée pour combattre les antivaleurs et dont la cible principale n’est autre que Joseph Kabila – le prédécesseur de Félix Antoine Tshisekedi – a sensiblement remis en cause le pouvoir du chef de l’État . Beaucoup parmi ses partisans ont dû perdre la confiance , estimant que son prédécesseur avait encore le contrôle et les reines du pouvoir.
Qu’à cela ne tienne, les enlèvements – quelques soient leurs objectifs – sont des pratiques en rupture avec les acquis d’un état de droit.
Les services de sécurité et les stratèges du pouvoir de Félix Antoine Tshisekedi doivent rectifier les tirs pour qu’un réel état de droit soit de mise au lieu des actes populistes isolés, spectaculaires et éphémères qui ternissent par contre l’image du pays.
Jean Médard LIWOSO