Alors que le débat autour de leurs remplacements à la cour constitutionnelle aura suscité une vague de tension au sein de la coalition fcc-Cach, les deux juges de la haute cour, Kilomba et Ubulu, sont finalement sortis de leur silence.
« Excellence Monsieur le Président de la République, c’est par la voix des ondes et sans consultation préalable, que nous avons appris, le 17 juillet 2020, nos nominations en qualité de Présidents à la Cour de Cassation, par Ordonnance n°20/108 du 17 juillet 2020, lesquelles ont été suivies de nos remplacements immédiats, alors que c’est depuis juillet 2014 pour le Juge Kilomba, et avril 2018 pour le Juge Ubulu, que par nos lettres respectives dont copies vous étaient réservées en leurs temps, nous avions levé l’option de ne plus travailler à la Cour Suprême de Justice, jusqu’à l’expiration de nos mandats de neuf ans à la Cour constitutionnelle, et ce, conformément à la Constitution, en son article 158, alinéa 3, ainsi qu’à la Loi-Organique n°13/026 du 15 octobre 2013, portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle, en ses articles 6 et 34 », c’est le rappel sous forme d’une mise point que l’on déjà lire dans l’introduction du courrier envoyé au chef de l’Etat Félix Antoine Tshisekedi en date du 27 juillet 2020.
Remerciements pour la nomination
Tout en présentant les remerciements de leurs familles biologiques au président de la République pour avoir pensé à leurs modestes personnes, Noël Kilomba et Jean Ubulu ont néanmoins, tenu à informer le chef de l’Etat « que conformément à la Constitution, en son article 158, alinéa 3, et à la Loi-organique n°13/026 du 15 octobre 2013, portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle, en son article 6, nos Mandats respectifs sont de neuf (9) ans pour chacun, et sont encore en cours ».
Pour eux , l’ordonnance présidentielle du 17 juillet dernier n’avait pas fait allusion à la loi organique portant organisation et fonctionnement de la cour constitutionnelle.
« Quant à l’Ordonnance n°20/108, du 17 juillet 2020, nous notifiée, elle ne fait pas allusion, dans ses visas, à la Loi-organique portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle, mais elle s’est plutôt basée sur les articles 69, 79, 82, 152 et 153 de la Constitution, qui mettent en exergue Votre pouvoir sur les juridictions de l’Ordre judiciaire et le Conseil Supérieur de la Magistrature, alors que la Cour constitutionnelle ne fait pas partie de cet Ordre de juridictions, dont seul son Président est en même temps Président du Conseil Supérieur de la Magistrature et non les membres de la Cour.
En plus, l’Ordonnance n°20/108, du 17 juillet 2020, s’est référée aux articles 10 et 11 de la Loi organique n°06/020 du 10 octobre 2006, portant Statut des Magistrats telle que modifiée et complétée par la Loi- organique n°15/014 du 1″ août 2015, alors qu’aux termes de l’article 90 de cette même Loi-organique, il est dit expressément ce qui suit : « les dispositions de la présente Loi ne s’appliquent pas aux membres de la Cour constitutionnelle ».
Cette Ordonnance n°20/108, du 17 juillet 2020, ne devrait donc pas nous être appliquée, en l’espèce, car la Loi-organique à laquelle elle se réfère l’interdit en son article 90 ci-haut énoncé », écrit – on au Magistrat Suprême de la RDC.
Et ce n’est pas tout. Kilomba et Ubulu estiment qu, aux termes de l’article 11 de la Loi-organique n’13/026 du 15 octobre 2013, portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle, il est précisé que: » Les membres de la Cour Constitutionnelle sont régis par un Statut particulier « . Ce Statut, qui est différent du Statut des Magistrats, est, lui, fixé par ‘ordonnance n°16/070 du 22 août 2016, portant dispositions relatives au Statut particulier des membres de la Cour constitutionnelle, à laquelle l’ordonnance n°20/108 du 17 juillet 2020 ne s’est aucunement référée, précise – t – on dans le courrier.
Le renouvellement des mandats prévu pour avril 2021
« Enfin, la Constitution de la République Démocratique du Congo, en son article 158, alinéa 4, a effectivement prévu le renouvellement des membres de la Cour Constitutionnelle par un tiers, par groupe, tous les 3 ans. En l’espèce, ce renouvellement est prévu en avril 2021, et, ne pourrait nous concerner nous deux (2), en même temps, étant donné que nous sommes tous les deux Juges issus du même groupe.
C’est pourquoi, en conformité à la Constitution, spécialement en son article 158, alinéa 3, nous nous trouvons dans l’obligation de rester à la Cour Constitutionnelle pour y achever nos Mandats constitutionnels.
Après ces mandats constitutionnels, nous demeurerons totalement et entièrement à la disposition de la République », ont – il conclu dans leur correspondance de 3 pages.
Noël Kilomba et Jean Ubulu sont parmi ces juges qui ont été toujours présentés à tort où à raison comme des « Kamikazes » à la cour constitutionnelle. Noël Kilomba par exemple est celui qui a toujours été utilisé pour les dossiers hautement sensibles. C’est lui qui avait chapeauté la chambre ayant invalidité la candidature de Jean-Pierre Bemba Gombo à la dernière présidentielle au motif que ce dernier aurait été condamné par un jugement définitif dans l’affaire subornation des témoins. Ce qui n’était pas du tout vrai , car à l’époque des faits, il n’y avait pas encore un jugement définitif dans cette affaire.
Et c’est toujours le même Noël Kilomba qui avait présidé la chambre de composition qui avait statué sur le contentieux électoral des résultats de la présidentielle de décembre 2018, ayant rejeté le recours de Martin Fayulu et confirmé la victoire de Félix Antoine Tshisekedi.
Avec cette correspondance adressée au chef de l’Etat, il est fort à parier sur un bras de fer qui risque d’alimenter encore les débats et peut-être diviser la coalition au pouvoir.
Il faut dire qu’avant leur entrée en fonction, les nouveaux juges constitutionnels doivent en principe prêter serment devant le chef de l’Etat en présence de l’Assemblée nationale et du sénat réunis en congrès.
Jeannine Mabunda et Alexis Thambwe Mwamba vont – ils se plier à cette exigence constitutionnelle sans qu’une solution nécessaire ne soit trouvée au sujet de la correspondance des juges Kilomba et Ubulu?
L’avenir nous le dira !
Rédaction